[227] Après avoir escaladé le talus qui marque la limite entre la sixième et la septième fosse, les deux poètes découvrent, en haut de ce talus, la continuation de la jetée qui se dirige vers le puits central, et dont la partie correspondant à la sixième fosse s'était effondrée.
[228] Les deux poètes traversent entièrement la septième fosse, avant de la visiter; en sorte qu'ils arrivent, sur la jetée, au point où elle enjambe le talus de séparation entre la septième et la huitième fosse. C'est là qu'ils s'arrêtent, pour descendre ce talus, sur la pente qui les ramène au fond de la septième fosse. Celle-ci est occupée par les voleurs, qui vivent mêlés à des serpents, soumis à des tortures et à des transformations diverses.
[229] Les noms de ces serpents sont pris de Lucain, Phar-sale, IX, 708-721.
[230] L'héliotrope est une pierre précieuse verte, à peu près pareille à l'émeraude; on croyait au Moyen Age qu'elle guérissait le venin des serpents et qu'elle rendait invisible.
[231] La construction de ces vers est remarquable par sa correspondance avec la description du Lévrier dont le poète attend le salut de l'Italie (Enfer, I, 103-105). Ce parallélisme n'est peut-être pas l'effet d'un simple hasard.
[232] Vanni Fucci, fils de Fuccio dei Lazzeri, de Pistoia, vola vers 1293, en compagnie de Vanni della Mona, notaire, et de Vanni Mironne, le trésor de la chapelle de Saint-Jacques, dans le dôme de sa ville. Plusieurs accusés furent torturés inutilement, l'un d'eux allait être pendu, lorsque Vanni della Monna confessa son crime et indiqua ses complices. Il fut pendu, en 1296; mais Vanni Fucci avait déjà pris la fuite. Cf. Peleo Bacci, Dante e Vanni Fucci, secondo una tradizïone ignota, Pistoia 1892. Dante semble l'avoir connu personnellement.
[233] Dante avait beau jeu en prêtant cette prophétie à Vanni Fucci, car tous les faits indiqués ici s'étaient produits entre 1300, date présumée du voyage infernal, et la composition du poème. Cela vient à dire que Pistoia chassera les Noirs, ce qu'elle fit en mai 1301, avec l'aide des Blancs qui dominaient à Florence. Florence changera de maître: allusion au retour de Corso Donati, chef des Noirs, ramené par Charles de Valois, à la Toussaint de 1301. La tempête qui jaillit du val de Magra, dans la Lunigiane, semble être le marquis Moroello Malaspina, chef des Lucquois et principal appui des Noirs de Florence; le Champ Picène a été identifié par Dante, d'une manière erronée, avec Pistoia; cette ville tomba, en effet, entre les mains des Lucquois et des Noirs florentins, en 1305-1306, ce qui signifia une des Noirs amère défaite pour les Blancs en général, et pour Dante en particulier: de là l'esprit de vengeance qui dicte la prophétie de Vanni Fucci.
[234] Geste obscène qui consiste à serrer le poing en introduisant le pouce entre l'index et le médius.
[235] Capanée, dont il a été question au chant XIV, 63-72.
[236] Cacus, fils de Vulcain; il avait été tué par Hercule, parce qu'il avait volé son bétail. C'est Dante qui en fait un centaure, car l'Antiquité le voyait comme un homme monstrueux, satyre à moitié. Son passé de voleur fait qu'il est à sa place ici; mais on ne sait pourquoi le poète lui imposa cette métamorphose, qui l'aurait dû placer avec les autres centaures, au septième cercle (chant XII).
[237] Ce sont des Florentins: Agnolo Brunelleschi, d'une famille distinguée, mais soupçonné de s'être approprié les deniers publics; Buoso Donati (selon d'autres commentateurs, Buoso degli Abati), dont l'identité n'a pas été bien établie; et Puccio Sciancato, de la famille des Galigaï. Les transformations qui suivent, et dont le poète parle avant d'avoir individualisé ses personnages, sont difficiles à comprendre, si l'on ne tient pas compte des noms des trois.
Agnolo se métamorphosera en serpent, échangeant son être premier avec Cianfa Donati; et ensuite c'est Buoso qui devient serpent, par voie d'échange avec Francesco Cavalcanti.
[238] Cianfa Donati, qui de serpent deviendra homme, était mort avant 1289. Il appartenait à la famille de Gemma nonati, la femme de Dante, et paraît avoir joui d'une belle réputation de larron.
[239] Ces deux Romains, qui appartenaient à l'armée de Caton, moururent par suite des morsures des serpents, dans le désert de Libye; c'est du moins ce que rapporte Lucain, dans sa Pharsale, chant IX. Il est question de Cadmus changé en serpent et d'Aréthuse transformée en fontaine dans les Métamorphoses d'Ovide, aux chants IV, 563-603, et V, 572-661.
[240] À Puccio Sciancato, le seul des trois qui ne souffre aucune métamorphose.
[241] Le serpent qui avait mordu Buoso est maintenant Francesco Cavalcanti. Il avait été tué par les habitants de Gaville, qui eurent beaucoup à souffrir par la suite de la vengeance de ce crime, qui fit parmi eux d'innombrables victimes.
[242] Les deux poètes remontent le talus qu'ils venaient de descendre (chant XXIV, 72-81) pour visiter la septième fosse. Une fois en haut, ils ont sous leurs pieds la huitième fosse, occupée par les conseillers de la fraude, qui circulent sous une enveloppe de flammes.
[243] Le prophète Élisée. Comme des enfants se moquaient de lui, deux ours sortirent soudain, qui mangèrent quarante-deux d'entre eux (Rois IV, 11: 23-24). Il vit en effet le char d'Élie monter au ciel (Rois IV, 11: 11-12).
[244] Étéocle et Polynice, fils incestueux d'Œdipe et de Jocaste et frères ennemis, finirent par s'entre-tuer, et leurs corps furent brûlés sur le même bûcher. Cependant, de leurs cadavres qui brûlaient sortirent deux flammes qui se séparèrent aussitôt, formant deux pointes qui semblaient se combattre encore. La double flamme que regarde Dante se sépare parce que, selon les commentateurs, ceux qui se sont unis pour le mal finissent par devenir ennemis.
[245] Le portrait d'Ulysse n'était déjà pas très flatteur dans le poème de Virgile. Son association avec Diomède dans la même damnation s'explique par des méfaits communs, tels que ceux que mentionne Dante; mais cette association n'était pas indiquée par les sources classiques.
[246] Le sens de cette phrase n'est pas clair; et les interprétations que l'on en offre sont insuffisantes. On pense en général que cela signifie:
«Comme ils sont Grecs, donc orgueilleux, ils pourraient te mépriser.» Cependant, le texte italien, traduit à la lettre, dit seulement: «Car peut-être seront-ils revêches, en t'écoutant, parce que ce sont des Grecs.» Cela semble dire que ce n'est pas pour la personne de Dante que Virgile craint le mépris, mais pour sa façon de parler. Il pensait peut-être que, comme pour les Grecs, tous les étrangers étaient des barbares, Ulysse et Diomède pourraient fort bien traiter Dante comme tel.