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– Je vous le jure! dit Fausta.

Quelques minutes de silence s’écoulèrent. Guise songeait à cet ascendant que la mystérieuse Fausta avait pris sur lui. Il mettait en balance son amour et son ambition. Et il ne voulait renoncer ni à l’un ni à l’autre. Et voici comme il arrangeait les choses: Violetta prisonnière, il la retrouverait quand bon lui semblerait. Prisonnière dans l’abbaye de Montmartre, sous la garde de Maurevert, elle ne pouvait lui échapper. Donc, il se servait d’abord de Fausta pour conquérir la couronne. Une fois roi… il verrait à mettre Fausta elle-même à la raison.

– Adieu donc, madame et souveraine, dit-il en s’inclinant. Je compte sur votre parole sacrée: à savoir que la bohémienne ne sera à personne! Et qu’elle sera gardée en l’abbaye.

– Il est impossible au mensonge de passer par mes lèvres, répondit gravement Fausta. Mais vous qui n’êtes qu’un homme, vous qui portez en vous toutes les faiblesses de l’humanité, je n’ai pas besoin de vous dire que je compte sur votre parole: je saurai vous forcer à la tenir. Adieu, duc!

– Je vous escorte jusqu’à votre logis, dit le Balafré d’une voix altérée.

– Mon logis est partout. Partout je suis en sûreté. Et dussiez-vous un jour me faire jeter dans la Bastille, lorsque je vous aurai jeté, moi, sur le trône de France, sachez-le, les murs de votre Bastille tomberont à mon premier geste…

Elle s’éloigna, laissant Guise frappé de stupeur et aussi de terreur, de voir sa pensée confuse si nettement exprimée par Fausta. Elle s’éloigna de ce pas majestueux, avec cette dignité incomparable qui faisait d’elle plus qu’une reine: une déesse.

– Est-ce que vraiment c’est l’esprit de Dieu qui l’anime! murmura Guise.

Il la chercha des yeux et ne la vit plus. Alors, cette horreur sacrée dont parlent les poètes s’empara de lui. Guise qui n’avait jamais tremblé sur un champ de bataille trembla de se voir seul au fond des ténèbres de cette église où il venait de parler à l’envoyée de Dieu! Et avec un frémissement de tout son être, les cheveux hérissés, les yeux hagards, il s’enfuit…