[91] Le sens de cette hésitation se trouve expliqué un peu plus loin.
[92] La dame qui règne aux Enfers, Hécate, déesse de la lune: ce qui veut dire que, dans moins de cinquante lunaisons, le poète jugera autrement de l'art de revenir sur les lieux d'où l'on a été chassé. Les cinquante lunaisons mènent d'avril 1300 à juin 1304. Dante avait été exilé depuis janvier 1302: on ne saurait dire pourquoi Farinata lui fait attendre deux ans de plus, pour découvrir à quel point l'exil pèsera sur son destin.
[93] La famille des Uberti avait été décrétée ennemie de la patrie à Florence; à l'endroit où s'élevait leur maison, démolie par décret de la République, fut ouverte la place de la Signoria; et tous les pardons octroyés aux exilés exceptaient les Uberti.
[94] Ceci s'applique sans doute à l'exclamation de Cavalcanti, qui croyait son fils mort: preuve qu'il ne savait pas ce qui se passait en ce même instant sur la terre.
[95] L'explication est sans doute une excuse, sans qu'elle soit nécessairement exacte. Dante dit qu'il n'a pas répondu à Cavalcanti, parce qu'il pensait que les morts doivent savoir la vérité sur ce qui se passe dans le monde; mais s'il le pensait, pourquoi le demande-t-il encore à Farinata? Tout cet épisode paraît témoigner d'un certain embarras. Guido Cavalcanti devait mourir quelques mois après l'époque où se place le voyage de Dante: il était sans doute déjà mort, au moment où Dante écrivait ces vers. Il s'agissait donc, pour le poète, de savoir s'il parlerait de son ami comme d'un vivant, ou comme d'un mort, ou comme de quelqu'un qui allait mourir. C'est ce qui pourrait expliquer ses hésitations. Il choisit la première solution; mais on le voit s'étonner de l'ignorance du père sur ce qui va se produire incessamment, éprouver un certain embarras lorsqu'il faut s'expliquer sur ce point, et cependant employer le passé lorsqu'il parle de son ami, comme si celui-ci était déjà mort.
[96] Frédéric II, empereur d'Allemagne et roi de Sicile de 1220 à 1250, réputé épicurien parmi ses contemporains; d'après le chroniqueur Salimbene, il avait fait réunir «tout ce qu'on pouvait trouver dans l'Écriture sainte de nature à prouver qu'il n'y a pas d'autre vie après la mort» Le Cardinal est Ottaviano degli Ubaldini, évêque de Bologne (1240-1244), cardinal (1245-1273), connu pour des sentiments à peu près semblables.
[97] Virgile promet à Dante que Béatrice lui découvrira l'avenir; mais Béatrice ne le fait qu'indirectement, en le faisant parler à Cacciaguida, qui lui dit effectivement quel sera son sort. Les commentateurs pensent que c'est à cet épisode (Paradis, XVII) qu'il est fait allusion ici, par anticipation. Il est cependant permis de penser que cette promesse ne fut pas tenue par le poète, et que la marche qu'il suivit dans la composition de son poème l'éloigna de cette première intention.
[98] Les deux poètes se trouvent en ce moment sur le rebord du sixième cercle, au-dessus du septième; mais ils ne descendront jusqu'à ce dernier qu'au commencement du chant suivant.
[99] Anastase Il fut pape de 496 à 498. On l'accusait, peut-être à tort, de s'être laissé séduire par l'hérésie de Photin, diacre de Thessalonique et sectateur d'Acacius, qui croyait que le Christ n'avait en lui que la seule nature humaine.
[100] Ce sont les septième, huitième et neuvième cercles de l'Enfer. Virgile explique ici leur distribution et leur affectation. En voici l'essentiel: les trois derniers cercles sont réservés aux pécheurs par malice, divisés en deux classes: les violents plus haut, et les traîtres plus bas. Parmi les derniers, on distingue la violence contre le prochain, contre soi-même et contre Dieu, ce qui donne la distribution du septième cercle, celui des violents, divisé en trois girons concentriques. Le huitième cercle contient les fraudeurs contre ceux qui sont prévenus et sur leurs gardes; et le dernier est réservé aux traîtres, qui trompent la confiance de leurs semblables.
[101] Sodome est le symbole de la luxure ou du péché contre nature. Les habitants de Cahors avaient, au Moyen Age, la réputation peu enviable d'usuriers particulièrement rapaces; il n'est cependant pas établi de façon certaine si les usuriers appelés Cahorsins étaient Français (Muratori), Italiens (Du Cange) ou juifs (Depping); cf. Chaudruc de Crazannes, Dissertation sur les banquiers nommés Cahursins, dans Revue d'Aquitaine, V, 1860-1861, pp. 318-325.
[102] Dite est ici Lucifer; on verra, dans le dernier chant de l'Enfer, que c'est Lucifer, en effet, qui occupe le centre du monde.
[103] En d'autres termes, les colériques du chant VIII, les luxurieux du chant V, les avares et les prodigues du chant VII; c'est-à-dire tous les pécheurs qui, occupant les premiers cercles de l'Enfer, restent au-dehors de Dite, la cité aux murs de feu.
[104] L'éthique d'Aristote.
[105] Il y est dit que l'homme tirera son aliment de la terre, à la sueur de son front.
[106] Ce qui vient à dire que l'aube du nouveau jour approche.
[107] Selon la plupart des commentateurs, cet écoulement est celui des Slavini di San Marco, sur l'Adige, au-dessous de Rovereto.
[108] Le Minotaure, monstre à tête de taureau. La mythologie raconte que Pasiphaé, femme de Minos, s'était fait construire une vache en bois, dans laquelle elle était entrée, pour se livrer aux assauts d'un taureau dont elle était tombée amoureuse. C'est de cette union contre nature qu'était né le Minotaure, gardien prédestiné des violents et des sodomites.
[109] On sait que le Minotaure avait été mis à mort par Thésée, fils du roi d'Athènes, aidé par Ariane, qu'il avait d'abord séduite. Ariane, fille de Minos et de Pasiphaé, était donc sœur utérine du Minotaure.
[110] Virgile avait déjà dit qu'il avait fait un premier voyage jusqu'au fond de l'Enfer, obligé par les sortilèges d'Erichto (Enfer, IX, 22). Lors de ce voyage, il avait trouvé debout le rocher qui barrait le passage du sixième au septième cercle, et qu'il trouve à présent écroulé. La brèche a dû s'ouvrir, par conséquent, entre son premier voyage et la descente du Christ aux Enfers: ce qui indique que le rocher s'est écroulé lors du grand tremblement de terre qui accompagna la mort du Christ.
[111] Selon Empédocle, les atomes qui forment les quatre éléments s'associent ou se séparent au gré de deux forces dominantes, l'amour et la haine: il est évident qu'il entend par amour l'attraction ou l'affinité.