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– Ours, mon ami, que veux-tu? Il répondit:

– Mon maître, qui a tué le dragon, est ici; je suis chargé de demander des sucreries semblables à celles que mange le roi.

La princesse fit venir le confiseur, qui reçut l’ordre de préparer des sucreries pareilles à celles que mangeait le roi, et de les porter lui-même pour l’ours jusqu’à la porte de l’aubergiste.

– Vous le voyez, monsieur l’hôte, dit le chasseur, voilà que j’ai maintenant du pain, du rôti, des légumes et des sucreries; mais je veux aussi boire du vin pareil à celui que boit le roi. Il appela son lion et lui dit:

– Lion, mon ami, je sais que tu te grises volontiers, va donc et rapporte-moi du vin semblable à celui que boit le roi.

Le lion traversa les rues, et les gens fuyaient à son approche, et quand il arriva près du poste, le factionnaire voulut lui barrer le passage: mais il poussa un rugissement qui mit tous les soldats en fuite. Le lion pénétra jusqu’à la chambre de la princesse, et gratta légèrement avec sa queue à la porte. La princesse vint lui ouvrir, et peu s’en fallut que l’effroi ne s’emparât d’elle à la vue du lion; mais elle le reconnut au fermoir d’or de son collier, et fit entrer avec elle dans son cabinet:

– Lion, mon ami, lui dit-elle, que veux-tu? Il répondit:

– Mon maître, qui a tué le dragon, est ici; je viens demander du vin pareil à celui que boit le roi.

La princesse fit venir le sommelier, et lui ordonna de donner au lion du vin semblable à celui que buvait le roi. Le lion prit le panier et le porta à son maître.

– Vous le voyez, monsieur l’hôte, dit le chasseur, j’ai maintenant du pain, du rôti, des légumes, des sucreries et du vin pareils à ceux qu’on sert au roi; maintenant, je veux donner un banquet à mes animaux.

Et il se mit à table, but et mangea, et donna aussi une bonne part de tout cela au lièvre, au renard, au loup, à l’ours et au lion car la certitude qu’il venait d’acquérir que la princesse l’aimait toujours lui donnait une humeur charmante. Quand le repas fut terminé, il dit à l’hôte:

– Maintenant que j’ai mangé et bu comme boit et mange le roi, je veux aller à la cour du roi, et épouser la fille du roi. L’aubergiste répondit:

– Comment cela pourra-t-il se faire, puisque la princesse a déjà un fiancé, et que ses noces doivent se célébrer aujourd’hui même?

Le chasseur tira de sa poche le mouchoir que la princesse lui avait donné sur la montagne du dragon, et où il avait roulé les sept langues du monstre.

– Ce que j’ai là dans la main m’y aidera, dit-il. L’aubergiste examina le mouchoir et repartit:

– Si j’ai cru tout le reste, je ne puis pourtant pas croire cela, et je parie volontiers ma maison et ma cour.

Le chasseur tira de sa poche une bourse où se trouvaient mille pièces d’or; il la plaça sur la table et dit:

– Voici mon enjeu. Lorsque le roi revit sa fille au dîner, il lui dit:

– Que te voulaient toutes ces bêtes qui sont venues te trouver et qui ont parcouru en tous sens mon palais? Elle répondit:

– Je ne puis point le dire, mais dépêchez quelqu’un et faites chercher le maître de ces animaux; si vous faites cela, vous ferez bien.

Le roi envoya un de ses gens à l’auberge avec mission d’inviter l’étranger; le serviteur du roi arriva juste au moment où le chasseur venait de parier avec l’aubergiste.

– Vous le voyez, monsieur l’hôte, s’écria le chasseur, voilà que le roi m’envoie un ambassadeur afin de m’inviter.

Le chasseur se rendit auprès du roi. Celui-ci, le voyant venir, dit à sa fille:

– Comment dois-je le recevoir?

Elle répondit:

– Allez à sa rencontre; si vous faites cela, vous ferez bien.

Le roi alla donc à sa rencontre, le fit monter avec lui dans les appartements où les bêtes du chasseur le suivirent. Le roi lui indiqua une place entre lui et sa fille, le maréchal en sa qualité de fiancé prit place de l’autre côté. En ce moment, on apporta en face d’eux les sept têtes du dragon, et le roi dit:

– Ces sept têtes, c’est le maréchal qui les a coupées au monstre; voilà pourquoi je lui donne aujourd’hui ma fille.

Alors le chasseur se leva, ouvrit les sept gueules et dit:

– Où sont les sept langues du dragon?

À ces mots, le maréchal devint pâle il dit dans son trouble:

– Les dragons n’ont point de langue.

Le chasseur reprit:

– Les menteurs devraient n’en point avoir, mais les langues de dragon sont les vrais signes du vainqueur.

Et il ouvrit le mouchoir où se trouvaient les sept langues et il en mit une dans chacune des sept gueules. Cela fait, il prit le mouchoir sur lequel était brodé le nom de la princesse, et le montrant à la jeune fille, il lui demanda à qui elle l’avait donné. Elle répondit:

– Je l’ai donné à celui qui a tué le dragon.

Puis il appela ses animaux, leur enleva à chacun leur collier ainsi qu’au lion son fermoir d’or, et les montrant à la jeune fille, il lui demanda à qui cela appartenait. Elle répondit:

– Le collier et le fermoir d’or étaient à moi, je les ai partagés entre les animaux qui ont contribué à dompter le dragon.

Le chasseur dit alors:

– M’étant endormi de fatigue après le combat, le maréchal est arrivé, m’a coupé la tête, a enlevé la princesse et déclaré que c’était lui qui avait tué le dragon; en quoi il a menti, comme le prouve par ces langues, par ce mouchoir et par ce collier.

Le roi s’adressant alors à sa fille:

– Est-il vrai, lui dit-il, que c’est lui qui a tué le dragon?

Elle répondit:

– Oui, c’est vrai; et maintenant il m’est permis de dévoiler toute l’infamie du maréchal qui m’avait fait donner ma parole que je garderais le silence. C’était aussi pour cela que j’avais exigé que les noces n’eussent lieu qu’après un an et un jour.

Après avoir entendu cette déposition, le roi fit appeler douze conseillers qu’il chargea de juger le maréchal. Ceux-ci le condamnèrent à avoir les membres déchirés par quatre bœufs. Ainsi fut puni le maréchal. Ensuite, le roi donna sa fille au chasseur qui fut de plus reconnu dans tout le pays pour son héritier. Le jeune roi et la jeune reine vécurent désormais heureux et contents. Le jeune roi allait souvent à la chasse qu’il aimait, et ses animaux devaient l’accompagner. Or il y avait à peu de distance de là une forêt qui, d’après le bruit général, n’était pas sûre. Celui, disait-on, qui s’y risquait une fois, n’en revenait pas facilement. Depuis longtemps le jeune prince nourrissait un grand désir d’aller y chasser, et il ne laissa pas de repos au vieux roi qu’il lui en donna la permission. Il sortit donc un jour avec une nombreuse escorte, et quand il fut arrivé près de la forêt, il aperçut à travers les arbres une biche blanche comme de la neige, et il dit à ses gens: