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Le Bruit des Arbres battus d’un vent impétueux.

Le bruit des Arbres battus d’un vent impétueux épouvanta tellement les Lièvres, qu’ils se mirent tous à fuir avec vitesse, sans savoir où ils allaient dans leur fuite. Ils trouvèrent un Marais qui les empêcha de passer outre. Les Grenouilles saisies de crainte s’y précipitèrent incontinent pour se cacher. Au moment que la peur allait faire jeter les Lièvres dans l’Étang, l’un des plus vieux de la troupe les arrêta, en leur représentant qu’ils avaient pris l’alarme mal à propos, à cause du bruit du vent et des feuilles. – Nous ne sommes pas les seuls qui craignions, continua-t-il, puisque nous avons fait peur aux Grenouilles. -

D’un Chevreau et d’un Loup.

Une Chèvre sortit de son étable pour aller paître, recommandant très expressément à son Chevreau de n’ouvrir la porte à personne durant son absence. À peine était-elle sortie, qu’un Loup vint heurter à la porte de l’étable, contrefaisant la voix de la Chèvre, et il commanda au Chevreau de lui ouvrir. Cet animal profitant des leçons de sa mère, regarda par une ouverture, et reconnut le Loup. – Je n’ouvrirai point, lui répliqua-t-il; car quoique tu contrefasses la voix d’une Chèvre, je vois bien à ta figure que tu es un Loup, et que tu ne cherches qu’à me dévorer. -

Du Chien et de la Brebis.

Le Chien fit un jour assigner la Brebis devant deux Aigles, pour la faire condamner à lui payer un pain qu’il disait lui avoir prêté. Elle nia la dette. On obligea le Chien à présenter des témoins. Il suborna le Loup, qui déposa que la Brebis devait le pain. Elle fut condamnée, sur ce faux témoignage, à payer ce qu’elle ne devait pas. Quelques jours après, elle vit des Chiens qui étranglaient le Loup. Cette vue la consola de l’injustice qu’on lui avait faite. – Voilà, s’écria-t-elle, la récompense que méritent de tels calomniateurs. -

Du Laboureur et du Serpent.

Un Paysan se mit un jour en colère contre un Serpent qu’il nourrissait, et prenant à la main un bâton, il se mit à le poursuivre. Le Serpent, après avoir reçu quelques blessures, s’échappa. Depuis cette aventure, le Laboureur tomba dans une extrême pauvreté, et crut que les mauvais traitements qu’il avait faits au Serpent étaient la cause de son malheur. Il alla le chercher, en le priant de revenir dans sa maison. Le Serpent s’en excusa, et lui dit qu’il ne pouvait s’y résoudre, ne croyant pas pouvoir vivre en sûreté avec un homme si incommode. – Quoique mes plaies soient guéries, ajouta-t-il, le souvenir de tes cruautés ne peut s’effacer de ma mémoire. -

Du Renard et de la Cigogne.

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Un Renard plein de finesse pria à souper une Cigogne à qui il servit de la bouillie sur une assiette. La Cigogne ne fit pas semblant de se fâcher du tour que lui jouait le Renard. Peu de temps après, elle le pria à dîner; il y vint au jour marqué, ne se souvenant plus de sa supercherie, et ne se doutant point de la vengeance que méditait la Cigogne. Elle lui servit un hachis de viandes qu’elle renferma dans une bouteille. Le Renard n’y pouvait atteindre, et il avait la douleur de voir la Cigogne manger toute seule. Elle lui dit alors avec un rire moqueur: – Tu ne peux pas te plaindre de moi raisonnablement, puisque j’ai suivi ton exemple, et que je t’ai traité comme tu m’as traitée. -

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Du Loup et de la Tête.

Un Loup étant entré dans la boutique d’un Sculpteur, y trouva une tête de relief fort bien travaillée. Il la tourna de tous côtés et la contempla à loisir, sans qu’elle proférât une parole. – Oh la belle tête! s’écria-t-il; que cet ouvrage est admirable! C’est grand dommage qu’elle n’ait point de cervelle, et qu’elle ne puisse donner aucun signe de vie. -

Du Geai paré de plumes de Paon.

Un Geai plein de vanité se para avec des plumes de Paon qu’il avait ramassées. Cet ornement emprunté lui causa tant d’orgueil, qu’il en conçut du mépris pour les autres Geais. Il les quitta et se mêla fièrement parmi une troupe de Paons, qui reconnaissant sa supercherie, le dépouillèrent sur-le-champ de ses plumes postiches. Cet animal tout honteux après cette disgrâce, voulut retourner avec les Geais; mais ils le rebutèrent violemment, et lui donnèrent tant de coups de bec, qu’ils lui arrachèrent toutes ses plumes empruntées; de sorte qu’il se vit méprisé des autres Oiseaux, et même de ceux de son espèce.

De la Mouche et du Chariot.

Une Mouche s’étant arrêtée sur un Chariot qui courait dans la lice, où les chevaux et l’agitation des roues élevaient une grande poussière: – Quelle nuée de poudre je fais élever, s’écria-t-elle en s’applaudissant! -

De la Fourmi et de la Mouche.

La Fourmi eut un jour querelle avec la Mouche, qui se vantait de voler comme les oiseaux, d’habiter dans les Palais des Princes, de faire toujours grande chère, sans qu’il lui en coûtât aucune peine. Elle reprochait à la Fourmi la bassesse de sa naissance, et qu’elle rampait toujours à terre pour chercher de quoi vivre avec beaucoup de travail et d’assiduité; qu’elle était réduite à ronger quelques grains, à boire de l’eau, à habiter les cavernes. La Fourmi répondait à tous ces reproches qu’elle était contente de son sort; qu’une demeure sûre et arrêtée lui plaisait mieux qu’une vie errante et vagabonde; que l’eau des fontaines et les grains de blé lui paraissaient d’un goût exquis, parce que c’étaient des fruits de son travail: au lieu que la Mouche se rendait incommode à tout le monde, et méprisable par sa fainéantise.

D’un Singe et d’un Renard.

Dans une Assemblée générale des Animaux, le Singe sauta avec tant de légèreté et tant d’adresse, qu’ils l’élurent pour leur Roi, avec l’approbation de toute l’Assemblée. Le Renard, qui ne put regarder son élévation sans envie, ayant aperçu dans une fosse de la viande cachée sous des filets, mena le Singe sur le bord de la fosse, lui disant qu’il avait rencontré un trésor, et que c’était au Roi à s’en saisir, parce que la Loi le lui attribuait. Le Renard exhorta donc le Singe à s’emparer promptement de ce trésor. Le Singe étant entré inconsidérément dans la fosse, fut attrapé au piège qu’il n’avait pas aperçu. Se voyant pris de la sorte, il reprocha au Renard sa perfidie. – Monsieur le Singe, lui répliqua le Renard, puisque vous êtes si peu avisé, comment prétendez-vous avoir l’empire sur tous les autres Animaux? -