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Lettre 75. Gaudet, à Laure.

[Cet esprit tentateur conduit tout à la perdition.].

24 octobre.

Je viens d’ôter le dernier asile à la mariageomanie d’Ursule: j’ai parlé de façon au conseiller, sans paraître moins zélé pour Ursule et pour sa famille, que je l’en ai dégoûté. C’est à un souper chez M. de Ch***: j’ai feint de boire un peu au-delà de la mesure de l’homme prudent; et dans cette ivresse simulée j’ai divulgué, preuve en main, au moyen d’une certaine lettre qu’Ursule a écrite, certains secrets de cette belle. J’ai retiré adroitement ma lettre, après qu’on en a eu lu ce que je voulais. Le voilà marié de ce matin. Il épouse une coquette fieffée: cet homme a une étoile qui le domine furieusement!… Le pauvre homme aime encore Ursule, tout en fulminant contre elle; et réellement il m’a fait pitié. Mais s’il m’avait importé que la sœur de mon amie se mariât, ç’aurait été au marquis, et non à ce petit robineau provincial. J’écrirai demain à Edmond, et je le renverrai aux détails que je te fais. Tu sais comme il faudra les rendre: ma lettre sera égarée, ou tout ce que tu voudras. Il était essentiel que je partisse! La belle dame nouait l’intrigue, et le mariage s’accomplissait. Que de peines! Le sort me doit un succès glorieux; il ne me le donnera pas, je l’achète. Dès que je pourrai m’échapper d’ici, je retournerai où mon cœur et mes affaires m’appellent. Je ne crains pas grand-chose à présent du marquis. Que fera-t-il? Il n’enlèvera plus; et quand il le ferait? Séduira-t-il? je le voudrais. Entretiendra-t-il? À la bonne heure. Il faut donner de la (…) à ce faquin de Lagouache, nous n’avons plus besoin de ce drôle-là. Commence à le détruire dans l’esprit de ta cousine. Les (…) ne sont bons à rien dans aucun cas; à moins qu’il n’y ait encore une vertu bien raboteuse à aplanir.

P.-S. – Crois-tu que nous soyons soupçonnés? Examine cela; je t’envoie un brouillon de lettre que tu mettras au net, pour URSULE je le crois nécessaire, pour parer à tout.