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– Regarde à ton tour!… Regarde démon!… Regarde le corps de Madeleine Fourcaud!… Regarde!… La corde se brise!… Regarde!… La voilà dans les flammes!… Belgodère!… Belgodère!… Celle qui brûle ne s’appelle pas Madeleine!… Elle s’appelle Flora et c’est ta fille!…

À ces mots, Claude, d’un mouvement frénétique, repoussa Belgodère dans la chambre et, avec une imprécation sauvage, enjambant l’appui de la fenêtre, il sauta dans le vide. Belgodère avait poussé un de ces hurlements sinistres comme en ont les fauves qu’on égorge.

Ainsi que dans un cauchemar, il vit Claude traverser l’espace, tomber, rouler sur le dos, puis se relever, et la dague à la main, se ruer sur la multitude, vers le bûcher… vers Violetta!… Belgodère tendit les bras, des larmes de sang coulèrent sur son visage monstrueux, et cette voix rauque, cette voix de tigre qui gronde devint tout à coup d’une douceur ineffable:

– Flora!… ma Flora!… Morte!… Morte comme ta mère!… Morte de cette mort hideuse!… Oh! ma Flora!…

Tout à coup, il se recula avec une clameur déchirante.

– Et Stella!… Ma toute petite Stella!… Dire que je ne t’ai pas reconnue cette nuit! Oh! bénédiction des astres bienfaisants! Il m’en reste donc une!… À toi, ma Stella!… Attends, voici ton père qui accourt te délivrer!…

La vision de Stella enfermée par lui-même dans l’enclos de l’abbaye de Montmartre fulgurait dans son imagination. Il s’élança. Il se rua… Et tout à coup, il se sentit saisi à l’épaule par une main de fer. Son regard hébété de douleur et de joie, de désespoir et d’espérance, son regard où il y avait des ténèbres de mort et des aubes de vie, se fixa sur l’homme qui l’arrêtait.

– Qui es-tu? que veux-tu? gronda-t-il.

– Je suis le père de Violetta, dit Farnèse d’une voix glaciale. Et tu vas mourir ici!…’.

– Le père de Violetta! vociféra Belgodère stupide d’étonnement. Le père de Violetta, c’est Claude.

– Le père de Violetta, c’est moi! clama Farnèse avec un accent de surhumain désespoir. Et puisque c’est toi qui la tues, meurs donc! Meurs et sois damné!…

En même temps, la dague de Farnèse jeta un éclair. Mais les émotions qui venaient de le bouleverser avaient achevé de briser en lui les ressorts de la vie… La dague ne s’abattit pas! La main de Farnèse ne retomba pas sur Belgodère… Le cardinal ouvrit les bras tout grands, tournoya sur lui-même et s’abattit comme une masse, évanoui… Belgodère s’élança, descendit en quelques bonds, et une fois dehors se prit à courir vers la porte Montmartre.

L’évanouissement de Farnèse ne dura que quelques secondes. Les violentes pensées qui tourbillonnaient dans sa tête furent plus fortes que la faiblesse physique. Il ouvrit les yeux et se vit seul. De la place de Grève une immense rumeur montait… une étrange clameur qui n’était plus le hurlement de mort de tout à l’heure, mais un fantastique tumulte de cris furieux… Farnèse, pantelant, se traîna vers la fenêtre…

– Oh! que je la voie une dernière fois! balbutia-t-il.

Il se hissa, appuya ses deux mains crispées à l’appui… et alors… ce qu’il vit alors fut sans doute un de ces prodigieux spectacles comme en imagine l’esprit dans la fièvre des rêves insensés… car ses yeux se dilatèrent jusqu’à s’exorbiter, et son visage livide exprima un fabuleux étonnement!…