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Le Coffre était à présent redevenu sombre; les lampes faiblissaient, comme si elles avaient été neutralisées par l'épaisse fumée. Nous allions bientôt être plongés dans l'obscurité complète.

J'attendais, j'attendais, prêt à chaque instant à entendre l'ordre de redonner de la lumière; mais il n'arrivait pas. Je restais sans bouger, je regardais avec une intensité épuisante les nuages de fumée qui continuaient à s'échapper du Coffre, dont la luminosité s'affaiblissait. Les lampes baissèrent, puis s'éteignirent les unes après les autres.

À la fin, il n'y eut plus qu'une seule lampe allumée, elle était vaguement bleuâtre et elle vacillait. Je gardais les yeux fixés sur Margaret, dans l'espoir qu'une légère atténuation de la demi-obscurité me permettrait de l'apercevoir. C'était à présent pour elle que j'éprouvais toute cette anxiété. Je pouvais juste voir sa robe blanche au-delà de la forme vague du sarcophage.

Le brouillard noir devenait de plus en plus profond et dense, son odeur caustique me donnait des picotements dans les narines et dans les yeux. À présent la fumée se dégageant du Coffre paraissait diminuer de volume et devenir moins dense. De l'autre côté de la pièce, je vis, à l'endroit où se trouvait le sarcophage, quelque chose de blanc qui bougeait. Il y eut plusieurs autres mouvements de ce genre. Je pus juste apercevoir un rapide reflet blanc à travers l'épaisse fumée, dans la lumière déclinante; car, pour l'heure, la dernière lampe elle-même commençait à vaciller et à avoir ses derniers sursauts avant l'extinction complète.

L'ultime lueur disparut. Je sentis que le moment était venu de parler. J'ôtai donc mon masque et dis à voix haute:

– Dois-je donner de la lumière?

Il n'y eut pas de réponse. Avant d'être étouffé par la fumée, j'appelai de nouveau, mais d'une voix plus forte:

– Mr. Trelawny, dois-je donner de la lumière? Répondez-moi! Sauf avis contraire de votre part, j'allume!

Comme je n'obtenais toujours pas de réponse, je tournai le bouton. Je fus horrifié, car je n'obtins aucun résultat; il y avait quelque chose de détraqué dans l'électricité. Je me déplaçai, dans l'intention de grimper l'escalier pour aller rechercher la cause de cette panne, mais je n'y voyais absolument pas, il faisait noir comme dans un puits.

Je cherchai mon chemin à tâtons à travers la pièce jusqu'à l'endroit où je pensais trouver Margaret. En marchant, je trébuchai sur un corps. D'après son vêtement, je pus sentir qu'il s'agissait d'une femme. Mon cœur cessa de battre; Margaret avait perdu connaissance, elle était peut-être morte. Je soulevai son corps dans mes bras et j'allai droit devant moi jusqu'au moment où je touchai un mur. Je le contournai jusqu'à ce que j'arrive à l'escalier, je montai les marches aussi vite que je le pus, ralenti comme je l'étais par ce cher fardeau. L'espoir aurait pu faciliter mon effort; mais, plus j'allais, à mesure que je sortais de la caverne, plus le poids que je portais paraissait s'alourdir.

Je déposai le corps dans le vestibule, allai en tâtonnant jusqu'à la chambre de Margaret, où je savais trouver des allumettes, et les bougies qui avaient été placées à côté de la Reine. Je frottai une allumette. Quel bien cela faisait de voir de la lumière! J'allumai deux bougies, j'en pris une dans chaque main, et me précipitai dans le hall où je croyais avoir laissé Margaret.

Son corps n'y était pas. Mais à l'endroit où je l'avais déposé, se trouvait la robe de mariée de la Reine Tera, et autour, il y avait la ceinture de merveilleuses pierres précieuses. Là où s'était trouvé le cœur, était posée la Pierre aux Sept Étoiles.

Le cœur défaillant, en proie à une terreur sans nom, je descendis dans la caverne. Mes deux bougies trouaient à peine l'impénétrable fumée de deux points lumineux. Je me replaçai sur la bouche le masque respiratoire qui pendait à mon cou, et j'allai à la recherche de mes compagnons.

Je les trouvai là où ils s'étaient placés. Ils s'étaient écroulés sur le sol, et leurs yeux qui regardaient vers le plafond étaient figés dans une expression d'indicible horreur. Margaret avait posé les deux mains sur son visage, mais le regard vitreux de ses yeux entre ses doigts était plus terrible qu'un regard à découvert.

J'ouvris les volets de toutes les fenêtres pour laisser entrer le plus d'air possible. La tempête se calmait aussi vite qu'elle s'était élevée, elle se réduisait à quelques bouffées de vent sans suite. Elle pouvait bien s'apaiser d'ailleurs, son œuvre était accomplie!

Je tentai tout ce que je pus pour mes compagnons, mais en vain. Là, dans cette maison solitaire, loin de toute aide, rien ne pouvait donner de résultat.

C'était une bénédiction, mais la peine d'avoir à espérer m'était épargnée.

(1903)

[1] Sic. Le passé simple du verbe extraire n’existe pas. [Note du correcteur.]