Le seul Bèlos, qui eut deux fils, dont l'un est mon père.

LE ROI PÉLASGOS.

Dis-moi le nom de cet homme très sage.

LE CHŒUR DES DANAÏDES.

Danaos, et son frère eut cinquante fils.

LE ROI PÉLASGOS.

Dis-moi complaisamment le nom de celui-ci.

LE CHŒUR DES DANAÏDES.

Aigyptos. Maintenant que tu n'ignores plus ma race antique, protége et sauve une famille argienne.

LE ROI PÉLASGOS.

Certes, vous me semblez, comme nous, issues anciennement de cette terre; mais comment avez-vous osé quitter les demeures paternelles? Quelle destinée soudaine vous a poursuivies?

LE CHŒUR DES DANAÏDES.

Roi des Pélasges, les maux des hommes sont divers, et le malheur n'a pas toujours le même vol. Car eût-on jamais prévu notre fuite inattendue vers cette terre d'Argos à laquelle nous lie une antique origine, et que nous y aborderions pour échapper à des noces odieuses?

LE ROI PÉLASGOS.

Et que demandez-vous à ces dieux qui président les jeux, tandis que vous tenez en mains ces rameaux récemment coupés et enveloppés de laine?

LE CHŒUR DES DANAÏDES.

De ne pas être les esclaves des fils d'Aigyptos.

LE ROI PÉLASGOS.

Est-ce par haine, ou pour éviter l'inceste?

LE CHŒUR DES DANAÏDES.

Qui voudrait payer afin d'avoir ses parents pour maîtres?

LE ROI PÉLASGOS.

Cependant, c'est ainsi que les vivants augmentent leurs richesses.

LE CHŒUR DES DANAÏDES.

Et c'est ainsi qu'on échappe aisément à la pauvreté.

LE ROI PÉLASGOS.

Comment donc pourrais-je vous venir en aide avec bienveillance?

LE CHŒUR DES DANAÏDES.

Ne nous livre pas aux fils d'Aigyptos qui nous réclameront.

LE ROI PÉLASGOS.

Tu demandes une résolution dangereuse, et j'en attends une guerre.

LE CHŒUR DES DANAÏDES.

La justice protègera ses alliés.

LE ROI PÉLASGOS.

Si, dès le commencement, elle a pris leur cause pour sienne.

LE CHŒUR DES DANAÏDES.

Respecte la poupe de ta ville ornée de rameaux.

LE ROI PÉLASGOS.

Je suis épouvanté de les voir ombrager ces autels!

LE CHŒUR DES DANAÏDES.

Elle est terrible, la colère de Zeus, protecteur des suppliants.

Strophe I.

Fils de Palaikhthôn, entends-moi avec bienveillance, ô roi des Pélasges. Regarde-moi, suppliante, exilée, errante, comme une génisse aux taches blanches sur un haut rocher. Elle mugit sans secours et raconte son péril au bouvier.

LE ROI PÉLASGOS.

Autour des autels des dieux qui président les Jeux, je vois cette foule de jeunes filles suppliantes, ombragée de rameaux récemment coupés. Puissent-elles, ces étrangères, ne pas être une cause de ruine pour nous, et puisse une guerre inattendue ne pas sortir de ceci. Certes, notre ville n'en a pas besoin.

LE CHŒUR DES DANAÏDES.

Antistrophe I.

Que Thémis, déesse des suppliants, fille de Zeus qui dispense les biens, regarde ma fuite innocente! Et toi, vieillard, apprends ceci de plus jeunes que toi: Si tu respectes un suppliant, tu ne manqueras de rien, car la volonté des dieux accepte les offrandes sacrées d'un homme pieux.

LE ROI PÉLASGOS.

Vous ne vous êtes point assises en suppliantes au foyer de mes demeures. S'il y a manque d'hospitalité, toute la ville en est responsable, et c'est au peuple tout entier à s'en inquiéter, afin d'échapper à l'expiation. Pour moi, je ne vous ferai aucune promesse, mais je délibérerai sur ceci avec tous les citoyens.

LE CHŒUR DES DANAÏDES.

Strophe II.

Tu es la ville, tu es le peuple, tu es le prytane souverain qui commandes à l'autel et au foyer. Tu es seul dans ta volonté, tu es assis seul sur le trône où tu régis toutes choses. Crains seul tout le mal.

LE ROI PÉLASGOS.

Qu'il retombe sur mes ennemis! Je ne puis vous venir en aide sans danger, et il est inhumain de mépriser vos prières. Mon esprit est plein de doutes et de craintes et je ne sais ce qu'il faut faire ou ne pas faire.

LE CHŒUR DES DANAÏDES.

Antistrophe II.

Celui qui d'en haut veille sur nous, regarde-le, ce gardien des malheureux réfugiés en suppliants auprès de leurs proches qui leur refusent la justice qui leur est due. La colère de Zeus, protecteur des suppliants, suit les plaintes vaines des malheureux.

LE ROI PÉLASGOS.

Mais si les fils d'Aigyptos affirment que, d'après la loi de cette ville, étant du même sang, vous êtes sous leur main, qui les réfutera? Il est donc nécessaire de leur opposer vos propres lois, si vous désirez prouver qu'ils n'ont aucun droit sur vous.

LE CHŒUR DES DANAÏDES.

Strophe III.

Que je ne sois jamais soumise à ces hommes! Plutôt fuir sous les astres, à travers les mers, ces noces odieuses! Mais tu prendras la justice pour compagne, et tu jugeras ainsi que le veut la majesté des dieux.

LE ROI PÉLASGOS.

La cause n'est pas facile à juger. Ne me prends pas pour juge. Je te l'ai dit déjà, même si j'en avais le pouvoir, je ne déciderais rien sans le peuple, de peur qu'il me dise un jour, si quelque malheur arrivait: – Pour avoir honoré des étrangères, tu as perdu ta ville.’