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Cette fois, Marie de Montpensier devint livide. Son sein palpita. Ses mains furent agitées d’un tremblement convulsif.

– Jacques! balbutia-t-elle dans un souffle.

– Oui, le moine Jacques Clément, dit Fausta avec cette forte énergie d’accent qu’elle employait dans les grandes occasions. Jacques Clément vous aime d’une passion absolue. Vous êtes pour lui l’ange de la débauche qui fait frissonner la chair, et l’ange de l’amour qui verse au cœur les charmes tout-puissants…

– Pauvre ami! murmura la duchesse tout bas.

La Fausta se leva.

– Voulez-vous que meure celui qui vous a insultée? dit-elle d’une voix basse et ardente.

– Oui, je le veux! haleta la duchesse avec un indescriptible accent de haine.

– Voulez-vous que votre frère soit roi?… Voulez-vous être la première à la cour de France, humilier ceux et celles qui vous ont humiliée, triompher par le luxe et la puissance, régner peut-être sous le nom de ce frère?…

– Oui, je le veux! répéta la duchesse enivrée…

– Soyez donc fidèle et obéissante, dit alors la Fausta en se redressant, tandis qu’une auréole de majesté étincelait sur son front. Allez, ma fille… agissez sans discuter… obéissez à celle qui vous parle en ce moment…

– Oh! s’écria la duchesse frappée d’une sorte d’effroi vertigineux, qui donc êtes-vous, madame, vous qui parlez comme si vous déteniez la souveraine puissance? vous qui bouleversez mon esprit? vous dont la voix me pénètre et dont les paroles me semblent un rêve?…

– Je suis, dit Fausta qui se transfigura dans un rayonnement de grandeur, je suis celle qui vous est envoyée par le conclave secret; je suis celle qui a été élue pour combattre Sixte, traître aux destinées de l’Église! Je suis celle qui parle haut parce que la parole qu’elle vous apporte est la parole même de Dieu!… Je suis la papesse Fausta Ire

La duchesse de Montpensier, effarée, l’esprit exorbité par un immense étonnement, jeta un regard sur la femme qui parlait ainsi, et elle la vit si rayonnante, si suprêmement belle et majestueuse dans son attitude, qu’elle recula, ploya les genoux et se prosterna, éblouie, fascinée… La Fausta alla à elle, la releva doucement, la baisa au front et dit:

– Allez… vous serez un de mes anges!…

Et la duchesse de Montpensier, éperdue, obéissante comme une enfant, sortit à reculons, courbée sous le geste de Fausta, geste d’irrésistible autorité, geste de bénédiction, geste terrible qui épandait de la mort et armait le bras de Jacques Clément!…