Passer sans transition de Pékin à New York eut raison de mon équilibre mental.

Mes parents perdirent le sens commun. Ils gâtèrent leurs enfants jusqu'à la démesure. J'adorais ça. Je devins odieuse.

Au Lycée français de New York, dix petites filles tombèrent folles amoureuses de moi. Je les fis souffrir abominablement.

C'était merveilleux.

Il y a deux ans, les hasards de la diplomatie mirent en présence mon père et le père d'Elena, lors d'une mondanité tokyoïte.

Effusions, échange de souvenirs du «bon vieux temps» à Pékin.

Politesses d'usage:

– Et vos enfants, cher ami?

Au détour d'une lettre distraite de mon père, j'appris qu'Elena était devenue une beauté fatale. Elle étudiait à Rome, où d'innombrables malheureux parlaient de se suicider pour elle, si ce n'était déjà fait.

Cette nouvelle me mit d'excellente humeur.

Merci à Elena, parce qu'elle m'a tout appris de l'amour.

Et merci, merci à Elena, parce qu'elle est restée fidèle à sa légende.